Série "Intime-Extime" - Norway

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INTIME / EXTIME 

"Le corps est à la base de tout, et la création artistique commence par le contact charnel au monde.

Plus qu'un contact, c'est d'une véritable interaction qu'il s'agit,

entre le monde intérieur de l'artiste

et tout ce que le monde extérieur peut lui offrir de substances et de respirations. (...)

en dernier ressort, c'est une vision intime, profonde, toute personnelle

que l'artiste doit s'efforcer d'atteindre.

C'est là qu'intervient l'âme (...)

la part la plus secrète de chaque être ;

depuis sa naissance, ou même avant,

elle entretient en lui, une lueur qui cherche à briller..."

François Cheng

C’est au cours de mes voyages (intérieurs et extérieurs) que mon écriture photographique se compose ; au centre, la question de la relation d’être au monde.

L’état d’être – âme, cœur, corps, esprit- s’impose dans une relation intime et extime au Temps (donnée qui précède, accompagne, et dépasse) impliquant l’impermanence et le changement, soit la transformation de l’Être, lorsque s’effectue la bascule d’un temps d’existence à un temps de vie, les deux restant pour le moins compatibles, parfois confluents, bien que segmentés.

Dès lors, l’extime prend le sens théologique d’essence/esséité -la propriété d'être infiniment dans un temps suspendu ou hors temps.

Extime, par référence au néologisme créé par Jacques Lacan et repris par Michel Tournier, revient également, au cours de ce « hors temps », à sonder l'intimité non pas de l'individu, mais de sa relation au territoire qui lui est extérieur.

Par conséquent, photographier cet extérieur revient à photographier un en-dedans externe, dans un temps déterminé « ici et maintenant », à ce moment là.

L’image ne se contente plus d’exposer ou montrer par témoignage (trace), encore moins d’exhiber. Elle devient réinterprétation du monde par une captation et transformation poétique, saisissant l’absence du sujet autant qu’une présence à être.

L’ici et maintenant d’une image ne se substitue plus désormais au là-bas antérieur de son objet.

Mes paysages vides d’humains, de la série « intime–extime », les révèlent, perceptibles, envisageables : parfois la main de l’homme façonne sans savoir.

La notion de temps ramène l'homme à son expérience intime, chacun en ayant une expérience particulière.

Au centre de cette interrogation sur le temps, je cherche à percevoir un « hors temps » (intemporalité), là où le temps n’existe plus, par la fixité d’une image qui ne fige pas pour autant, car elle n’empêche pas le mouvement.

Il est des immobilités en mouvement par le simple fait que le temps, dans et par l’image, est suspendu et que le mouvement est réactualisable. La relation au temps n'est plus alors irréversible mais renouvelable.

Photographier pour atteindre la part invisible, une part silencieuse par un regard porté différemment.

Voyager poétiquement, entre l’errance et le « laisser flotter » pour un temps d’otium suspendu, en portant un autre regard sur les choses : appréhender sa propre errance, à la rencontre de.

Un voyage comme une invitation à errer ou se découvrir soi-même par le paysage.


Gaël REBEL - 2014

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